Frédéric Beigbeder: «Boris Vian a-t-il été assassiné par Vernon Sullivan?»

Avant Romain Gary, Boris Vian avait réussi un extraordinaire canular littéraire: publier J’irai cracher sur vos tombes sous le nom de Vernon Sullivan.

Mais, de même que Gary a été détruit par Émile Ajar, Vian a été brisé par cet auteur imaginaire, noir américain, dont il se présentait comme le traducteur.

Moralité: il ne faut pas s’inventer une fausse identité ; c’est un jeu trop dangereux pour la santé mentale.

Boris Vian en a marre d’écrire des chefs-d’œuvre méconnus: Vercoquin et le Plancton rate le prix de la Pléiade, L’Écume des jours sort dans l’indifférence générale.

Boris imagine avec un ami éditeur, Jean d’Halluin, fondateur des éditions du Scorpion, de publier un roman policier dénonçant violemment le racisme, avec des scènes de sexe et de beuveries.

Écrit en quinze jours, J’irai cracher sur vos tombes raconte l’histoire de Lee Anderson, un «nègre blanc», c’est-à-dire d’un jeune métis blond, de peau blanche, qui va s’infiltrer…